Les coopératives et les organisations politiques et sociales en Afrique de l’Ouest – un exemple pour nous organiser en Europe de l’Est ? | Par Monika Karbowska

Par Monika Karbowska  

J’ai mis 6 ans à organiser ce voyage.  Depuis mon séjour au FSM à Dakar 2011, j’ai voulu revenir car j’étais fascinée par la force, l’opiniatreté et la capacité d’organisation des militants africaines. C’est des militantes que je voulais revoir, rencontrées lors du Forum Féministe de Kaolack pour lequelles de nombreuses organisations féminines étaient venues avec la Caravane d’Afrique l’Ouest. Le FSM de Dakar avait lieu alors que débutaient les mouvements révolutionnaires dans les pays arabes. Avec les militants tunuisiens participant au Forum nous vivions ensemble ces moments intenses, les yeux rivés sur Facebook et suspendus aux nouvelles des rassemblements qui nous arrivaient chaque jour de Tunisie. Par la suite j’ai soutenu les jeunes militants révolutionnaires de Tunisie.

Mais c’est ce premiert voyage au sud du Sahara qui m’avait montré qu’il n’y avait qu’une seule à faire : balayer devant ma porte, c’est à dire organiser  les mouvements anticapitalistes chez nous, en Europe de l’Est. Et je l’ai fait en 6 ans de voyages non seulement en Pologne ou Hongrie, mais aussi en Bulgarie, Roumanie, les pays yougoslaves, la Moldavie, jusqu’à l’Ukraine et la Russie. Ce furent 6 années  ans de création de liens  avec la nouvelle gauche issue des mouvements de 2011 à 2014 jusqu’à l’organisation du Forum Social d’Europe de l’Est et de Coopération avec le Sud de Wroclaw en mars 2016. Je m’interrogeais toujours pourquoi nous, les Européens de l’Est, nous sommes aussi perdus, aussi atomisés, aussi incapables d’organisation et de coopération, incapables de valoriser notre culture locale, notre production domestique agricole, notre histoire efin,  alors qu’elle est aussi celle de nos réalisations socialistes.

Sénégal

Je suis donc repartie en Afrique pour apprendre des expériences des amis africains. Dakar m’a accueillis début septembre dans une efferversnce d’une ville passée de 3 à presque 7 millions d’habitants. Les puissants mouvements Y en a Marre ont mené malgré toutes les vicissitudes  e à une certaine amélioration sociale et politique sensible dans les intermintables quartiers de banlieues  de Pikine, Guedawaye, Malika… Une autoroute a desenclavé les quartiers par le bord de mer, des routes ont été goudronnées quoique souvent sans système d’écoulement adéquat. L’electricité et l’eau potable sont est accessibles, les écoles présentes quoique souvent non publiques. Les Parcelles Assainies, une de banlieue en construction, est devenu un quartier animé de  boutiques bruyantes toute la nuit du week end. Les amis militants de Malika m’ont confirmé que les associations locales sont actives et politisées et qu’une allocation de 100 000 CFA par familles alouée par le gouvernement de Macky Sall permet au plus pauvres de survivre tout en continuant les activités de vente, de production et de services dans l’informel. Une vie politique et culturelle intense prend place dans ces quartiers, dont le plus beau symbole est le Centre Culturel de Guedawaye dirigé par les jeunes de Y en a Marre ou j’ai revu Fou Malade ; notre meneur politique de l’action contre la dette en 2011.

C’est l’association WIEGO et son animateur militant Adama Soumaré qui m’a reçue à Malika et expliqué son travail de soutien à l’organisation des travailleurs/ses de informel de ce quartier populaire. Le travail « informel », c’est ce qu’on appelle en Europe le « travail au noir », non déclarée et non encadré par des contrats de travail et des cotisations sociales. C’est aussi un travail comparable aux activités de survie que les citoyens de l’Est ont dévéloppé au moment des grandes misères des plans d’ajustements structurels du choc capitaliste des années 90 : agriculture dans des jardins de ville et de campagne, vente sur le bord des routes et des rues de produits agricoles, de bocaux de confiture, de légumes mis en bocaux traditionnellement dans l’écomie domestique, vente de baies et de champignons issus du ramassage dans les forêts, vente de fleurs, vente de tout, de toutes sortes d’objets récupérés, à tous les coins de rue pour gagner quelques sous pour s’acheter à manger et payer les factures d’électricité et de chauffage. (Cette survie comprenait hélas aussi la vente de son propre corps le long des routes et dans les rue des villes pour les femmes, les jeunes filles et les jeunes garçons et même pour des enfants…). En Afrique comme en Europe l’essor de l’économie rue est consubstantielle des conséquences des plans d’ajustements structurels des années 80 et 90, des privatisations de sociétés d’Etat et du licenciements des fonctionnaires. Les femmes surtout ont été obligées de prendre en main la survie de la famille et ont du développer des activités telles que la vente de produits alimentaires, de céréales, de poisson et la restauration de rue. Ces stratégies de survie étaient associées à des activités féminines comme le ménage et le lavage du linge. Les hommes de l’économie informelle sont artisants – coutururier, maroquinier, travailleurs de métaux, maçons mais aussi chauffeurs de taxi non déclarés. L’économie de survie en version féminine est alors une mise sur le marché informel  de la production domestique traditionnelle destinée à la consommation familiale. A l’économie de production du beurre de karité en Afrique  correspondent nos conserves de concombres et de champignons  que chaque famille fait traditionnellement dans les pays de l’Est.

Mais ce qui pour moi est extraordindaire est qu’en Afrique de l’ouest cette économie de survie a donné naissance à des structures de solidarité et et de coopération, à des groupements de productrices et à syndicats organisés en réseaux de quartier, de villes et de régions qui sont devenus aujourd’hui des structures pouvant avoir un considérable pouvoir politique. Les femmes du réseau REDA Droit au Développement pour d’autres Alternatives m’ont expliqué qu’elles ont été obligées de remplacer un Etat failli pour pouvoir vivre et envoyer leurs enfants à l’école (souvent il n’y avait plus d’école et il fallait en organiser une soi même…). Dès qu’elles ont compris la faille du micro crédit officiel, elles l’ont  remplacé par des crédit autogérés sans intérêts dans lequel ce sont elles mêmes qui déterminent les modalités du paiement. L’association de femme est aussi un recours financier et psychologique en cas de coup dur : maladie, suicide, veuvage, suicide… Des accidents de la vie face auxquelles en Europe nous devant souvent faire face seuls.

Au cours de leur réunion à laquelle j’ai assisté les coopératrices organisaient un Forum des groupements de toute la région. J’ai pu voir qu’étant organisées en structures légales afin de défendre leurs droits à vivre et à développer leur activité, elles élargissent leur influence politique  en s’intéressant à tous les aspects de la vie des habitants de leur quartier. Ainsi, elles ont repéré dans leur quartier des lingères migrantes d’autres pays africains. Les coopératrices sénégalaisent approchent ces femmes inviduellement afin de les inciter à imposer un prix unique par pièce de vêtements lavés. Dans la réunion il a aussi était question de lycéennes travaillant comme bonnes au moment des vacances scolaires, des  talibés souvent enfants orphelins vivant de la charité que les femmes coopératrices soutiennent afin de les amener petit à petit à consulter un centre de santé et se faire aider par des assistantes sociales. La force de ses associations économiques de femmes étaient déjà visible par leur participation massive à la manifestation d’ouverture du Forum Social Mondial à Dakar en février 2011,  prélude de tous les changements politiques qui secouèrent le Sénégal par la suite et qui continuent dans toute l’Afrique de l’Ouest. La capacité d’organisation des femmes en structures économiques, sociales et politiques couplée à la reconnaissance de la nécessité de parité en politique m’a convaincu depuis 2011 que cette parité ne sera pas figurartive comme elle peut l’être en Europe, simple loi ne changeant rien à la place des femmes dans la société, mais le levier d’un véritable pouvoir féminin dans le pays. Les femmes du groupement de Malia ont conclut que le Forum Social Mondial a été effectivement eu un effet dynamisant leur structures en leur donnant de l’espoir et une certaine reconnaissance.

Comme l’exprime Tenning Faye, la vétérane de l’association des femmes de Malika : « L’Union fait la force ! Il faut intégrer tout le monde, jeunes et âgées ensemble » !

Je me suis souvent posée la question pourquoi en Europe de l’Est il est si difficile de nous organiser de façon semblable. Je parle de nous, les travailleurs « informels », migrants légaux ou « ‘au noir » dans les pays occidentaux, ou  travailleurs semi formels dans nos pays ou il n’existe parfois plus de contrat de travail. Mes interlocutrices sénégalaises ont pris le temps de réfléchir à ma question. Elles  m’ont répondu qu’elles travaillaient quotidiennement ensemble, dans la rue ou dans les maisons en tant que domestiques, elles n’étaient jamais seules  mais vivaient en groupe. Le travail commun et l’absence d’esprit de concurrence facilitent ainsi l’entente et l’autoorganisation, une forte solidarité entre femmes sénégalaises partageant une même culture. L’invidualisme de la culture européenne, que nous cultivons sous le vocable de « liberté » s’avère ainsi être un frein important à notre émancipation. De plus les Européennes de l’Est n’ont jamais pu bénéficier du soutien de structures occidentales pour nous aider à « renforcer nos capacités » (selon le vocabulaire ONGiste consacré…). Les vendeurs de rue et des marchés informels de Pologne, de Hongrie ou de Bulgarie, les domestiques et les maçons au noir, les travailleurs détachés n’ont pas été soutenus dans leur autoorganisation par des associations ou des syndicats de l’occident qui auraient pu pourtant rémunérer un coordinateur  les aidant à organiser la structure juridique, mettant à disposition un ordinateur, internet, un lieu de rencontre et ses compétences pour coordonner la naissance d’une structure de travailleurs pauvres. Nous sommes restés seuls et inorganisés.

Les 6 à 7 millions d’habitants de Dakar s’affairent autour de nous dans la banlieue de Malika. Plus je plonge dans la ville, ses boutiques, ses commerce ambulants, ses artisants, transports en commun, ce chaos apparent s’avère parfaitement organisé. Aux structures toujours faibles de l’Etat suppléent les citoyens dans leur admirable « autogestion ». Mais l’Etat est plus présent qu’en 2011. De grands travaux du projet Dakar 2020 sont lancés. Le but est de restructurer toute la ville en déplaçant entreprises et administrations de la presqu’île historique du Plateau et de les reconstruire dans une banlieue excentrée. La rocade le long de la mer est en passe d’être achevée. Un train reliant centre et banlieue est en projet. Dans le centre le musée des Civilisation Africaines est presque terminé. Sur le campus de l’Université Cheik Anta Diop ou nous avons passé les jours inoubliables du Forum de 2011, de nouvelles cités universitaires voient le jour. Elles sont construites par une entreprises publique chinoise. L’immense  nouveau stade arbore une banderole en chinois et en français visible de tous les côtés : « cadeau du peuple chinois au peuple sénégalais ». Certes, je ne peux que me réjouir que les longues luttes étudiantes aient enfin abouti à une amélioration des conditions de vie des jeunes. Mais je fais part à mes amis de mon doute sur la restructuration d’un centre ville historique qui déplacé ailleurs, risque non seulement de ressembler à un quartier d’affaire genre Levallois Perret, mais il aussi sera tellement éloigné que les pauvres auront du mal à s’organiser pour manifester devant les bâtiments présidentiels… Car les luttes de rue pour être efficaces ont besoin de l’espace urbain, d’une vie collective dans un lieu déterminé et de batiments publics facilement accessibles et identifiables. Le succès du mouvement tunisien en 2011 tient aussi au fait que la vie sociale et politique se déroule dans un milieu urbain restreint d’un centre ville ancien largement pourvu en cafés et lieux de rencontres bon marchés et facilement accessibles.

Le risque de gentrification est toujours grand dans ce type d’opération. Le marché dit « malien » à côté de la gare ou les femmes vendaient karité, condiments et tissus a déjà été déplacé. Est ce les pauvres ne vont pas encore une fois être chassés des lieux ou pourtant la présence du pouvoir et des touristes attir une clientèle pour les produits locaux ?

De plus le projet d’un tel remodelage urbain suppose des investissements énormes dont la provenance de semble pas très transparentes. Dans le domaine de la culture, outre les entreprises chinoises, de puissantes fondations américaines sont bien présentes. En témoigne le parcours d’un jeune que nous avions soutenu lorsqu’en tant qu’étudiant « non orienté », donc privé de place à l’Université. En février 2011 il arpentait avec son groupe les couloirs de l’université pleines de militants altermondialistes. Ces jeunes manifestants  réclamaient de l’aide pour la lutte pour leur droit à l’éducation. Nous n’aurions pas pu décemment mener des débats sur le droit à l’éducation et abandonner à leur sort les jeunes Sénégalais dont nous occupions l’Université. ! J’avais menée avec le CADTM des entretiens avec Madicke et sa collègue Sema, nous avons médiatisé leur luttes et ils ont pu s’exprimer à l’Assemblée Plénière de la fin du Forum. Et voilà qu’il s’avère, que Madicke, par la magie de Facebook n’avait jamais perdu ma trace ! Nous nous revoyons et je suis fière de voir que le garçon de 19 ans si décidé est devenu … un jeune chercheur en archéologie sous marine ! Il mène un important projet de recherche sur les bateaux négriers immergés au largé de Gorée. Il est brillant et dynamique et explique qu’un nouveau centre de recherche va ouvrir sous peu, financé par des fondations afroaméricaines et sud africaines tandis que sa bourse doctorale, refuseé par la France, est prise en charge par l’Allemagne.

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De retour à Malika je rencontre les non moins brillants étudiants en philosophie et Sciences Politiques qui gèrnte le centre UNESCO, un centre culturel des jeunes du quarties. Le centre dispose d’une esplanade et d’un petit centre de santé. Mais les jeunes souhaitent construire une salle de réunion qui pourrait devenir une vrai salle de fêtes et une salle de lecture pour la petite bibliothèque qui ne peut être ouverte faute de fonds pour engager un bibliothécaire. Les jeunes diplomés sont précaires, dépourvus de salaires et de bourses. Ici les fondations américaines ne se bousculent pas et les jeunes, farouchement souverainistes, préfèreraient ne pas dépendre de l’argent d’un Etat bien connu pour son impérialisme. Mais comment les aider alors qu’en Europe les citoyens s’appauvrissent rapidement et que la politique austéritaire que l’Allemagne impose partout chez nous a déjà raboté les petits budgets municipaux de solidarité internationale de type « coopération décentralisée » aptes à financer ce genre de projets ? Je visite l’Ecole associative de Saine Baptiste de Malika, au coeur du quartier. Même pendant les vacances les enfants du quartier bénéficient de soutien scolaire de remise à niveau. Elle est soutenue par des parrainages individuels suite à patient travail de mise en relation entre Europe et Afrique menée pendant des années par Thèrèse et Adama Soumaré, militants et véritables piliers de la vie sociale et politique de leur quartier. Sans eux, ce quartier ne seraient pas ce qu’il est : un lieu de vie qui prend forme et qui acquiert un pouvoir politique que les élites néolibérales ne peuvent plus ignorer

Je quitte à regrets les amis du Sénégal avec ces interrogations qui sont autant de viatiques pour mes actions politiques.

Le Mali des luttes pour un Etat socialiste paysan

J’étais contente d’arriver à Bamako avec mon bus, citeé posée sur des collines autour du mythique et majestueux fleuve Niger que j’ai tellement voulu découvrir. J’ai aimé les larges rues bordées d’arbres, les maisons-concessions en banco, les boutiques d’artisanats et les stands de produits alimentaires dans le quartier de Djelibougou ou j’étais hébergée. J’ai noté la dense circulation automobile, les mobylettes, les vélos et les petits bus urbains. Accueillie par les amis du le CAD, Coalition des Alternatives Africaines Dette et Développement, j’ai pu grâce à eux rencontrer des associations de femmes et des organisations politiques anti-capitalistes radicales dont les actions et les luttes m’ont redonné espoir en l’avenir.

La CAD est à elle seule un monde de lutte. Née en 1998, ce réseau structuré de 30 organisations a toujours été un solide pilier du CADTM Afrique sous la houlette de son leader le regretté Sekou Diarra décédé en 2014. La CAD regroupe des organisations paysannes, des tradithérapeutes, des coopératives de femmes et forme ainsi un mouvement majeur de lutte contre la mise sous tutelle du pays par le système dette du FMI et de la Banque Mondiale, contre l’accaparament des terres et contre l’exploitation des plus pauvres par le micro-crédit. Le Forum des Peuples qu’elle organise chaque année est un des plus vaste espace de liberté d’expression des revendications de la société civile malienne et au delà dans toute l’Afrique de l’Ouest. C’est une véritable Assemblée de Démocratie directe, « un marché des peuples ».

Le SADI

Mais si la CAD consitue un « peuple organisé en associations », le parti SADI Solidarité pour une Afrique Démocratique et Indépendante m’apparut comme le fer de lance politique de ce peuple avec Oumar Marikou, brillant leader de cette formation. Il m’a reçue et avec amabilité m’a raconté les luttes intenses du mouvement étudiant qui renversa finalement le dictateur ultralibéral Moussa Traoré  en 1991. Mais la dissolution de l’URSS et le triomphe de l’Occident capitaliste délégitimait les organisations anticapitalistes dans le monde entier et consacrait une « ONG-isation » des sociétés soumise à la mondialisation néolibérale avec son cortège de privatisations, de coupes budgétaires et de mise en concurrence tous azimuts sur un marché planétaire. Les puissants mouvements de gauche n’ont ou aboutir qu’à une « démocratie » libérale chancelante qui se décomposa avec la crise économique de 2008 et politique de 2012 à laquelle fit suite l’intervention militaire française face à l’avancée djihadiste opportunément surgie du désert après la destruction de la Lybie par la France et les Etats Unis. Héritage de ces lutte des années 90,  le réseau de radios associatives Kayira « Amitiés » assure au parti SADI une importante audience locale et une popularité électorale qui l’amène à compter 281 conseiller municipaux, 15 maires et 5 parlementaires. Oumar Mariko lui même gagna sur la troisième place en terme de voix aux élections présidentielles de 2014. La base sociale du parti est constituée de paysans cultivant eux même leur sol et devant assurer la vente de leur production dans un système ultralibéral ou l ‘oligarchie préfère favoriser les importations de produits étrangers et ne met en place aucune politique de soutien à la consommation de produits locaux. L’oligarchie ne cherche pas de valorisation de produits locaux, il n’y a pas de prix d’achat garantissant un revenu au producteur, pas de groupement d’achats coopératifs permettant aux paysans d’’écouler leur production au prix garanti, pas d’investissement dans l’outil de production, dans la formation, dans les innovations. Au contraire, la primauté est donné à la vente ou location de milliers de hectares de terres à des multinationales étrangères afin qu’ellse cultivent des plantes industrielles pour le marché étranger (canne à sucre, cotton OGM, plantes à agrocarburant), possiblement transgéniques, tout en spoliant au possible les paysans des terres.

En écoutant cela, je me rappellais mes grands parents et de tout ce que le système communiste nous avait apporté dans une Pologne ou les paysans résistants à la collectivisation avaient gardé la petite propriété paysanne. Je me rappelais que l’Etat rachetait toute la production agricole tout en l’orientant vers les denrée les plus déficitaires. Je me rappelle des investissements dans les coopératives permettant d’avoir accès aux intrants et aux machines ainsi que des petites usines de transformation locales produisant des confitures, des surgelés, des conserves, ou nous vendions notre production de fruits et légumes rammassés à la main par toute la famille en été.

Bien sur, la Pologne avait aussi ses grandes fermes d’Etat organisées sur les terres des anciens aristocrates allemands dont les biens ont été nationalisés comme réparations de guerre. Ces terres produisait le blé, les légumes et la viande nécessaires aux villes car la propriété paysanne n’était pas capable de nourrir entièrement un pays en pleine expansion industrielle et démographique. Il y avait des ratés, par exemple l’élevage à viande toujours insuffisant au regard d’une population dont le niveau de vie augmentait et le mode de consommation évoluait. Mais l’Etat donnait toute sa place dans la société aux enfants des paysans en construisant des  écoles secondaires, des lycées agricoles et techniques et en leur permettant d’accéder gratuitement aux études supérieures. Les paysans exigeaient que l’Etat fournisse les services publics digne d’un Etat moderne, l’eau assasinie dans les maisons, l’électricité jusque dans les coin les plius reculés, les routes, les transports en commun, le téléphone, les centre de santé, les bibliothéque de villages, les salles de fêtes et de cinéma… Au Mali, comme me l’expliquent les militants du SADI chaque commune doit se débrouiller seule avec les financements ONGisés pour leur infrasutructures,  la vente des produits dans des marchés urbains aux prix fluctuants et concurrentiels, la concurrence des produits importés, et même avec la construction d’écoles.

Il est clair pour le SADI qu’un pays ne peut être développé par des financements d’ONG, surtout étrangères qui ont leurs propres intérêts, mais par un Etat au service de tous les citoyens. L’urgence est palpable car l’impatience du peuple s’exaspère devant un Etat inexistant alors que le 21 siècle avance et il est non seulement inconcevable de vivre sans électricité, sans centre de santé et écoles  mais également sans accès à internet. La « politique ONG » touche à sa fin et les profiteurs du système ne savent plus quoi faire pouir empécher les populations de mettre au pouvoir des organisations politiques portant haut des ambitions de planification et de renationalisation. La deuxième base sociale du SADI est constituée de jeunes chômeurs et précaires diplomés révoltés d’être les laissés pour compte d’une société ou aucun emploi qualifié n’est acessible sans appui ni piston. Aux révoltés de Tunisie, du Maroc et d’Egypte répondent ceux du Sénégal, du Burkina Faso, du Mali, du Togo… et ceux des Balkans et de Grèce car la mise à l’écart, l’impuissance politiques des jeunes va de paire avec leur marginalisation économique.  Le SADi est donc un parti de jeunes qui se développe de façon dynamique dans de nombreuses régions. Très populaire suite à sa dénonciation de l’impérialisme français depuis 2013, le leader du SADi est bien placé pour être deuxième aux élections présidentielles de juillet prochain. Potentiellement il peut donc… gagner. Et c’est là que les problèmes vont commencer.

La WILDAF

La réunion avec la WILDAF (Women in Law and Developpement in Africa) m’ a appris à comprendre le lien entre la marginalisation politique des femmes et la spoliation économique de tout un pays par des oligarchies compradore locales et par les impérialistes étrangers.

La WILDAF a comme objectif la protection et la promotion des intérêts des femmes. Quatre grands projets m’ont été présentés par Madame Dicko Boye Diallo et les trois cheffes de projets. Le premier concernait l’implication des femmes du Nord du Mali dans les « cercles de paix » accompagnant la négociation de l’accord de paix et de réconcialiation avec le Nord du pays. Sans femmes, pas de paix, et le dialogue entre les femmes du Nord et du Sud devait être un levier de la réconciliation nationale. Je savais par la Marche Mondiale des Femmes que lorsque les femmes sont les premières promotrices de la réconciliation, la paix a plus de chance de s’intaller. Il en a été ainsi à Chypre ou au Kosovo (ou les femmes ne laisseront plus les hommes faire la guerre comme me l’ont rappelé les femmes du  Kosovo Womens Center et Farhije Hoti, responsable de coopérative agricole à Rahovec dans le sud Kosovo. Mais la discussion avec Madame Diallo me rappelait douloureusement qu’il faudrait ainsi agir pour mettre fin à la guerre civile en Ukraine en impliquant les femmes de l’Ouest de l’Ukraine et du Donbass dans les négociations… Pourquoi ne pas prendre modèle sur nos consoeurs maliennes ? Madame Diallo le comprenait d’autant plus que, comme nombre d’intellectuels maliens de ma génération, elle avait fait ses études en… Ukraine soviétique, à Charkov, ville martyr de la guerre de 2014. De façon surprenante j’ai rencontré d’autres militants maliens qui avait vécu et passé une jeunesse incouciante en URSS.  Je l’ai exhorté à ne pas nous laisser seule et à nous aider à sortir de la guerre en Europe.

Le deuxième projet de la WILDAF était un projet de loi contre les violances basés sur le genre. La loi était prête mais n’avait pas été votée, les militantes s’activant pour renforcer les femmes en tant que candidates aux élections, notamment en tant que maire, chef de village, mais aussi conseillère régionale et parlementairs. La nouvelle loi visait à éradiquer l’excision, la répudiation, le mariagre précoce mais comme d’habitude dans les questions de droits des femmes, sans argent de l’Etat, sans formations des structures sociales à ces quesrtions, sans refuge pour les femmes victimes de violence, il est impossible de mettre en oeuvre une telle loi, dans le Sud comme dans le Nord.

La WILDAF a aussi mené une importante étude sur les droits des femmes à la terre et la jeune cheffe de projet me raconta bouleversé comment 90% des usagères de la terre agricole sont des femmes qui font vivre leur famille avec leur production vivrière, mais elle ne sont qu’un infime pourcentage à en être propriétaires. Certes, au Mali, la terre est propriété d’Etat gérée soit par le droit coutumier ou les chefs du village attribue des parcelles aux habitants, ou par les municipalités qui jouent le même rôle. Mais malgré une loi déjà obtenue censée attribuer 15% de la terre au femmes  et eux jeunes, il est plus fréquent que les chefs coutumiers accordent les terres les plus fertiles aux hommes pour des cultures de rente et aux femmes des parcelles petites, difficiles d’accès et moins rentables. Fréquemment ces responsables succombent à l’argent versé par des multinationales qui mettent ainsi la main sur des dizaines de milliers d’hectares de terre pour les cultures d’exportation sans que les paysans et paysannent ne soient aucunement indémnisés. Depuis 10 ans cette spoliation massive est au centre des luttes sociales au Mali et la sécurisation du foncier une des premières revendications de la Convergence Globales des luttes pout la Terre et pour l’Eau en Acfrique de l’Ouest.

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En écoutant Mlle Geneva Haby me raconter les luttes des femmes, je pensais fortement à les décollectivisation sauvage de nos campagnes en Europe de l’Est, qui a laissé les ouvrières agricoles sans revenus et les a poussé à la misère de l’exode et de l’émigration. Cette décollectivisation a été une reprivatisation sous forme de reféodalisation, les terres ayant été transférées dans les mains de la nouvelles oligarchie qui les a vendu au aux multinationales occidentales. Aujourd’hui, en Hongrie, en Bulgarie, Roumanie et en Pologne, les multinationales culvitent sur des centaines de milliers d’hectares du tournesol et du colza, du mais parfois OGM pour la production d’agrocarburant de l’UE tandis que la production agricole paysanne est sous-payée et la fabrication artisanale vendue sur les marchés locaux ne génère qu’un revenu de survie aux familles.

Pour la WILDAF changer la politique vis à vis des femmes implique de former les femmes afin qu’elles puissent conrôler les finances publiques et exiger ainsi que les dépenses aillent à la scolarisation des filles, aux centres de santé, aux politiques induisant des changements de comportement pour éradiquer la mentalité machiste méprisant les femmes, leur travail et leur rôle sociae. Je ne pouvais que souscrire, pensant à la marginalisation politique de mes consoeurs dans les campagnes et les petites villes d’Europe de l’Est malgré une instruction encore présente, héritage de l’égalitarisme de nos régimes communistes.

La visite à la Maison du Karité à Siby m’a permis d’avoir une idée de la production domestique des femmes et de leur mode d’organisation en coopératives.

 La coopérative Maison du Karité à Siby

La route de Bamako a Siby en direction de la Guinée était de toute beauté. La verdure des champs et des arbres, la petite rivière, les falaises et les cascades… Un air frais et bon alors même que le temps s’annonçait à la pluie. Dans les rizières et les plantations de maïs, j’ai enfin vu les arbres de karité que les amis me désignèrent. Ils poussaient en groupe ou solitaires parmi les mangiers lourds de fruits oranges  que les vendeuses proposaient le long de la route. « Kleska urodzaju » comme on disait dans le village de mon grand père, « une calamité de prospérité » pour signifier le malheur d’une trop abdondante récolte qui ramène le prix des fruits à presque rien, à ce que les ramasser et les vendre coûte plus que cela ne rapporte, faute de possibilité productive pour les amener auprès du consommateur urbain en camion ou de les transformer, congeler ou sécher. Les richesses de mangues ne rapportaient que quelque centaines de Francs CFA aux vendeuses de long des routes.

Le Karité quand à lui ressemblait à un grand fikus avec des feuilles persistantes oblongues et ouvragées. La Maison du Karité est une coopérative d’une certaine taille : plusieurs maisons en dur disposées autour d’une belle cour arborée, le long de la route dans Siby. Les productrices étaient en réunion dans la cour avec le maire de la commune au moment ou notre groupe est arrivé. Mais elles ont bien voulu répondre à mes questions et notamment m’expiliquer la technique de production du beurre de karité.

Les fruits du karité sont mûrs au mois de juin. Les femmes les ramassent en forêt sous les arbres sauvages ou avec l’autorisation des propriétaires sur les parcelles privées. Elles ramènent les fruits chez elles et les trient pour enlenver les fruits trop mûrs donnant aussi un beurre de médiocre qualité. Les fruits du karité sont sucrés et comestiblese et lorsqu’il y en a trop ou qu’ils sont trop gatés, on les donne même aux bestiaux. Pour rentabiliser l’opération les femmes de Siby pensent à faire de la confiture de karité et certaines coopératives le font déjà comme la coppérative Koostama rencontrée plus tard au Burkina Faso. La première opération consiste  donc à extraire les noyaux qui ressemblent à des noyaux d’avocats. Elle consiste à faire bouillir les fruits dans une marmite, de nouveau les trier et puis à sécher les noyaux ainsi extraits.

La suite des opérations alterne cuisson des noyaux et séchage avant de passer au broyage des noix décortiquées. Au cours de l’entretien j’ai compris qu’il y va du karité en Afrique comme du vin en Europe : il y a différents terroirs selon le sol et l’arrosage, différents types de fruits et de noyaux. Les femmes expérementent diverses techniques de production afin de trouver un bon équilibre entre la qualité et la rentabilité de la production.

La première méthode décrit le fait de bouillir pendant 4 heures  les noix à une température à 100 degrés. Cette méthode était meilleure car la cuisson asséchait les noix graduellement mais elle était couteuse. La deuxième consistait à faire bouillir l’eau à 100 degrés et mettre les noix dans l’eau. Par la suite, il était impératif de casser une noix pour vérifier si elle était à point. Si un liquide ressemblant à du lait s’en échappait, elle n’est pas encore prête et il faut reprendre la cuisson. Les noix cuites devaient par la suite être étalées sur un tissu propre et séchées au soleil pendant 1 mois. La période de séchage coincidant avec la période l’hivernage et des pluies, il fallait s’assurer en permance de mettre les noix à l’abri de l’humidité. Il est donc nécessaire de disposer d’un certain espace.

Les noix de karité sèches se conservent dans des sacs en toile. Les productrices ne transforment pas tout d’un coup, elles prélèvent du stock au fur et à mesure pour passer à la phase du  broyage. Je m’aperçus ainsi que la fabrication du beurre de karité est peut etre moins complexe que celle de l’huile d’argan (ou il est encore nécessaire de s’assurer du concours de chèvres mangeuses de fruits…) mais certainement moins simple que celle de l’huile d’olive ou le fruit noir et mûr de décembre laisse presque tout seul dégorger son jus – l’huile. A l’étape du broyage, l’écorce des noix est enlevée et une fève de la taille d’une bille apparait. Cette fève doit être parfaitement sèche et là encore les productrices procèdent à un tri sévère garant de qualité.

Le broyage traditionnel consiste en un concassage grossier avec une pierre puis un meulage au mortier comme pour le mil. Je me suis essayée à la technique du concassage avec Madame Salamata Ilboudo, productrice de beurre de karité à Saaba près de Ouagadougou. Cela ne m’a pas semblé si difficile car la fève séchée se casse facilement. Mais on parle ici d’heures et d’heures de travail afin de moudre des dizaines de kilos, puisque les femmes vont vendre leur production et en vivre. Madame Ilboudo déplorait que les jeunes filles refusent de faire ce travail et l’art de la production traditionnelle de karité risque de se perdre.

A Siby à la Maison du Karité la coopérative a pu investir dans des machines à moudre ce qui leur permet de produire plus de quantités, même si ces machines électriques restent de modestes dimensions artisanales. On approche alors de la phase finale. La poudre de fève de karité à ce stade est de couleur marron clair, de consistance légèrement huileuse au toucher et à l’odeur vague de cacao. Elle va devenir une pâte par rajout d’un peu d’eau. Dans la technique manuelle on rajoute de l’eau tout en continuant à piler. Dans la technique mécanisée on met la pâte dans la machine à malaxer. L’étape de production finale se passe dans la « baignoire avec eau » dans laquelle la pâte de karité est malaxée à froid jusqu’à ce que le mélange soit complètement blanc. Dès qu’une mousse blanche se forme à la surface, elle est récoltée et mise dans des marmites ou un tissu propre. Le beurre peut par la suite être légèrement chauffé et se solidifie après refroidissement. En général le beurre de karité fond très vite dès 25 degrée et se solidifie sous 20 degré sans perdre aucune de ses qualités.

Justement les qualités sont innombrables et bien connues en Afrique, bien moins connues en Europe. D’abord l’extraordinaire propriété hydratante qui fait que la sensation de gras sur la peau au début due traitement cède la place à une sensation de grand bien être et de douceur. Les autres propriétés liés à la qualité hydratante et à la présence de vitamines est la protection du chaud et du froid. Je n’utilise plus de biafine depuis que j’avais découvert que le karité avait la vertu de cicatriser notre peau blanche quand elle est brûlée par le soleil du sud. Dans les pays à gel comme les pays de l’Est, le karité protège le visage et les mains de gercures bien mieux que n’importe quelle crème norvégienne, tout en étant un produit cent pour cent biologique sans aucun ajout chimique d’aucune sorte. J’ai également constaté la propriété du karité de guérir des veines gonflées ou bleuies des jambes suite à la station debout ou un travail fatiguant. Même les petites  blessures se cicatrisent plus vite avec le beurre de karité… Les utilisatrices africaines m’ont confirmé que le karité servait à protéger les petits enfants du soleil et du vent pour toute la journée. Les femmes  l’appliquent également sur les cheveux pour les protéger du vent et retouver l’élasticité du cheveu. Pour mes cheveux raides européens le beurre de karité est presque trop riche et les laisse un peu trop huilés.

La Maison du Karité stocke son beurre dans de grands contenants avant de le commercialiser dans des boites en plastique avec une jolie étiquette de 1 kilo, 250 g ou 125g. Les femmes produisent aussi des pommades avec karité, cire d’abeilles et parfums naturel de fleurs ainsi que toute une gamme de savons au miel, à l’huile de neem, à l’argile, au conconmbre, hénne, carotte ou noix de coco. Grâce au concours de Max Haavelar, la coopérative dont le bureau de direction est composée uniquement de femmes productrices, possède des attestations de qualité FLO-CERT qui lui permettent d’exporter en Europe en commerce équitable.

Seule ombre au tableau, la mise en zone « Orange » par l’ambassade de France de toute la zone du Sud Mali sur le site internet de l’ambassade a quasiment arrêté tout tourisme dans cette région pourtant éloignée de 400km des problèmes politiques du Nord. Tous nos interlocuteurs se sont plaint de ce fait comme d’une sorte de sabotage économique, la vente aux visiteurs constituant une part importante du revenu des femmes de la coopératives.

Coalition Des Alternatives Africaines Dette et Développement

Le lendemain j’assiste à une réunion du Conseil d’Administration de la CAD. Car ces coopératives et organisations n’ont de poid politique que regroupées au sein de coordinations qui elles mêmes se regroupent en confédération. La CAD se définit depuis 2001 comme un mouvement politique malien visant à faire annuler la dette odieuse du Mali et changer toutes les politiques néolibérales menant à l’endettement du peuple et de l’Etat. Changer les politiques veut dire aider les populations à s’organiser pour définir et défendre leur intérêts, organiser des possibilités d’expression et ainsi construire une démcoratie réelle ou les populations les plus opprimés, femmes, jeunes, paysans, travailleurs de l’informel puissent avoir enfin leur mot à dire sur la LA politique qui les concerne.

La CAD participe au mouvement mondial pour la justice sociale, d’ou sa contribution très forte au processus des Forum Sociaux Mondiaux, via surtout le CADTM dont  elle abrite le siège du réseau Afrique. Son axe de lutte premier est l’abolition de la dette, le fait de cesser unilatéralement de payer la dette publique définie par le CADTM comme non seulement la dette souveraine de l’Etat mais aussi l’ensemble de l’endettement des caisses sociales et des structures publiques et parapubliques ainsi que la dette des particuliers vis à vis des banques. Concrètement pour se faire la CAD participe à des manifestations nationales et internationales sur le sujet, fournit des experstises sur la situation malienne et participe à des séminaires de formations éclairant les politiques des insitutions financières internationales. Le front des luttes est large : combattre les injustices sociales c’est remettre en cause les plans d’ajustement structurels du paiements de la dette en mettant en lumière leur conséquences. En 30 ans ces politiques ont détruit la scolarité, la santé et mené au chômage massif et au développement du secteur informe précaire.

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Le deuxième axe de travail de la CAD est la lutte pour la souveraineté alimentaire et le développement et la consolidation de l’africulture paysanne. C’est un axe stratégique auquel sont consacrées les ressources des soutiens financiers d’ONG occidentales Oxfam et SOS Faim. La lutte se développe à travers la dénonciation de l’accapartement des terres par l’agrobusiness occidental avec la complicité des politiques locaux et les pressions des insitutions financières internationales et autre « bailleurs de fonds ». La dénonciation « technique » via des expertises réalisées par l’association n’est pas suffisante. Il faut aussi soutenir les actions  des mouvements contre les dépossessions et autres « déguerpissements » en apportant aux paysans les arguements politiques et techniques nécessaires aux négociations avec les autorités. Les programmes de la CAD soutiennent les luttes pour la sécurisation juridique des petites parcelles paysannes mais réfléchissent aussi sur la consolidation d’un droit coutumier collectif traditionnel distinct de la propriété privée issus de la colonisation. La question est comment définir quel droit sera le plus à même de protéger les petits paysans et surtout les paysannes dans un monde globalisée géré par le droit de propriété défini par l’Occident et de faire pression sur les gouvernement pour que ce type de droit soit prépondérant dans la législation nationale. C’est ainsi que la CAD est le pilier de la CEMAT, et participe à la Convergence Globale des Luttes pour la Terre et l’Eau d’Afrique de l’Ouest.

Cette brûlante question de la « reféodalisation » des terres arables se posent partout dans les pays péripérique exploités par les multionales occidentales. Il apparait que la propriété paysanne tout comme la collectivisation n’ont hélas été qu’une courte parenthèse du 20ème siècle en Europe de l’Est, étroitement liée à l’existence de l’Union Soviétoque. En effet, les meilleurs terres d’Europe de l’Est n’ont historiquement jamais appartenues aux payans qui les cultivengt. La terre fut depuis 500 ans aux mains d’une aristocratie féodale remit les paysans au servage afin d’exporter le blé pour les cités de ouest capitaliste en plein essor. Ainsi toutes les luttes progressistes au 19 siècle étaient tendues vers l’objectif de la réforme agraire et de la distribution des terres. Les mouvements progressistes paysans ont quasiment tous, sauf en Bulgarie, échoué à cet objectif avant 1939. Il a appartenu à l’Armée Rouge en 1945 à procéder à cette ,justice historique de nationalisation des terres des féodaux et de leur distribution aux paysans. Cependant, comme cette mesure fut immédiatement suivi de la collectivisation plutôt forcée que voulue, sauf en Pologne, l’Etat reprit la place des féodaux. Comme on le voit la reprivatisation n’a nullement été une redistribution de terre aux paysans travaillant sur les fermes d’Etat comme ouvriers et techniciens mais  une nouvelle spoliation.

Cependant, si la petite propriété paysanne familiale a résisté en Pologne, Roumanie et Yougoslavie à la collectivisation, elle a succombé au capitalisme néolibéral et le transfert des fermes privés aux oligarques et multinationales s’est consolidé à la faveur la Politique Agricole Commune de l’UE.

La question des terres collectives dans les pays de l’Est fait partie de son patrimoine histoirique : les prairies des pâturages le long des fleuves sont toujours gérés communalement, les terres en jachère qui « ne sont à personne » sont nombreuses, et c’est dans ces interstices que des populations comme les Roms peuvent planter leur cabanes, faire paitre leurs bêtes et vivre d’une économie de commerce informel, de ramassage de déchets, de petite production artisanale  ainsi que de diverses petits services. Les diseuses de bonnes aventures, les musiciens, les fameux artisans tsginaes producteurs de ferblanterie ou de vanneries font partis du paysage historique des sociétés l’Est et des Balkans. Dans la modernité bureaucratique de l’Europe néolibérale ces pratiques sociales et économiques sont totalement incompréhensibles pour les classes aisés occidentales qui détiennent le pouvoir politique sur tout le continent. Comment défendre les Roms et leur mode de vie dans les marginaliser et les commautariser ? Les manifestants roumains avaient en 2012 répondu à la question en invitant les Roms les plus pauvres à se joindre aux cortèges de protestations sous le slogan « nous sommes tous des Roms et nous sommes tous des Roumains », en réponse aux éructations racistes de Nicolas Sarkozy. Les anarchistes bulgares font du soutien politique aux Roms bulgares menacés d’expulsion des terrains qu’ils occupent un axe de lutte politique. Il resterait à soutenir la création de syndicaat autonome dans les régions les plus pauvres d’Europe ou les Roms sont les travailleurs les plus exploités – dans la Vallée des Roses de Kazanlakh en Bulgarie, les pétales de roses qui donneront naissance au précieux élixir sont rammassées à la main par des femmes roms payées en dessous de 100 Euros alors que l’essence de rose est acheminée pour trois fois rien aux grandes parfumerie occidentale telle Guerlain sans que même la mention « made in Bulgaria » ne soit aposée sur le produit. Il faut dire que les terres  rosiers de cette région histoirique ont été les premiers à être accaparés par des holding occidentale et les oligarques mafieux.

Le corrolaire de la destruction de l’agriculture paysanne est l’émigration vers les grandes métropoles occidentales. Ici également l’Afrique et l’Europe de l’Est présentent des similitudes inquiétantes. Aux marches à travers le désert et aux traversées inhumaines de la Méditérannée correspondent les centaines de milliers de travailleurs détachés de l’Est acheminés en bus vers les usines, les champs et les chantiers de l’Ouest pour y être sous payés, exploités et renvoyés. Des pratiques d’esclavage ont été dénoncés par la CGT Intérim en France, IG Bau en Allemagne, l’Association Polonaise des Travailleurs Migrants, l’Inspection du Travail Eka à Athènes dans les années 2007-2013 déjà. Quelques grèves très dures ont permis dénoncer le scandale de ces pratiques. Mais rien n’a changé. Les travailleurs de l’Est et du Sud se retrouvent mis en concurrence pour les mêmes emplois par les même patrons qui se servent d’eux pour ne pas payer les cotisations sociales et les salaires minimums de travailleurs de l’Ouest ainsi maintenu au chômage. La majorité des migrants au Sud comme à l’Est sont des fils et filles de la campagne, enfants de paysans, d’ouvriers, de techniciens ou d’artisans d’entreprises publiques ou coopératives disparues dans l’ouverture à la concurrence et les privatisations. Dans ce domaine aussi la convergence des luttes nous permettraient de gagner en visibilité car le sujet des migrations est trop souvent abordés sous un angle humanitaire parfois misérabiliste. La CAD lutte pour une analyse politique des causes des migrations- et donc pour le renforcement des droits des migrants en tant que citoyens et travailleurs. Il ne s’agit par d’empécher les jeunes de partir, mais de rendre la construction de leur vie dans leur pays attrayante afin que ces forces vivent y restent et y donnent leur énergie.

C’est pour cela que la CAD et le SADI, le mouvement paysans et le mouvement des Sans Voix exigent en priorité la justice sociale matérialisée par la construction de services publics gratuits et acessibles à tous : centres de santé, écoles et universités publiques et gratuites (les jeunes militants ne m’ont que trop pointée que les meilleurs lycées du pays étaient privés) adductions d’eau, réseau d’électricité et d’internet, droits des travailleurs et travailleuses du secteur informel… Le retour à la construction d’un pays pour tous les citoyen/es débuté sous Modibo Keita et stoppé l’ong-isation des décennies néolibérales n’est pas un combat d’un futurr irréel mais une exigence impérieuse d’un peuple à bout de patience. La crise climatique entrainant désertification et migrations forcées vers les villes et vers l’étranger, la CAD a toujours expliqué le liens entre protection de l’environnement et soutien à l’agriculture paysanne. C’est ainsi que le mouvement social s’oppose aux Partenariats Publics Privés dans la gestion des terres de l’Office Public du Niger et au bradage et destruction des forêts. La Coalition exige une gestion publique des ressources naturelles au profit des habitants locaux. Dans la ligne de mir, l’orpaillage traditionnel et industriel qui est une source de richesse du pays mais les terres arables sont bradés à des concessions étrangères et l’extraction effectuée sans considération pour la biodiversité et le travail des paysans. Le soutien aux organisations de travailleurs et surtout travailleuses de l’orpaillage traditionnel fait également partie des objectifs de la Coalition de même que le soutien au développement du commerce équitable afin de rénunérer correctement le travail des paysans et des artisans.

Un des instrument important de lutte est l’epace démocratique de débat et de décisions des organisations populaires Le Forum des Peuples tenu une fois par an dans une petite ville du pays et rassemblant des milliers de personnes et des centraines d’associations. Le Forum n’est pas seulement un lieu de tranmission de savoir politique et de discussion sur les sujets internationaux tels  la dette, les interventions occidentales suite au destabilisation de la Libye par l’Occident, la spéculation sur les matières premières agricoles et son impact sur la vie des paysans. C’est aussi un espace d’expression ou le peuple rassemblé en agora structure son analyse politisque. La CAD mène des études de terrain sur les problèmes locaux, élabore des expertises qui servent  à la pression exercée sur le gouvernement, la Banque Mondiale et autres « bailleurs de fonds » internationaux. Elle organise « le Vestibule d’écoute et d’assistance jurisique » qui permet aux populations les plus défavorisées de se renseigner sur leur droit et de s’aider à l’autoorganiser.

Quelle leçon pour l’Europe de l’Est ?

Finalement il est paradoxale que la lutte pour la « dé-ngoisation » de l’Etat passe néecessairement par la création d’ONG citouyennes puissantes et structurées aidant les populations à prendre en charge les tâches que l’Etat bourgeois n’assume pas… Mais à ce stade il n’est peut être pas possible de faire autrement, comme le montre le désastreux exemple de nos pays de l’Est ou aucune autoorganisation n’existe vraiment. Les syndicats sont réduits à l’état de vestiges, les structures sociales sont privatisées ou servent à la coercition sociale. Les ONG payées par les fondations étrangères sont un paravent donnant des emplois à une mince couche d’employés de classe moyenne souvent d’ailleurs de la même nationalité que les fondations bailleuses de fonds. En 25 ans nombreux furent les Allemands débarquant en Pologne apprendre aux Polonais « la gestion démocratique », d’autres Occidentaux en Bulgarie ou Roumanie pour « soutenir l’inclusion des Rroms » avec un argent dont les Roms ne voyaient que de loin la couleur. Organiser un vrai syndicat dans les pays de l’Est se solde par une lourde répression, licenciement, mise sur liste noir, comme l’ont démontré de nombreux exemples en Pologne. Créer une association qui pose des sujets tabous se heurte à des obsctacles bureaucratiques dès le bureau des juges qui sont censés l’autoriser. Il est interdit de « faire l’apologie du totalitarisme », c’est à dire du communisme et du socialisme, voir la longue lutte du petit Parti Communiste Polonais KPP contre son interdiction par les juges de 1999 à nos jours. Même des structures social-démocrates modérées mais souhaitant le retour d’un Etat laiques et indépendant se sont heurtées aux volontés des puissances de les faire interdire. En 2002  au sein de la Commission Commune de l’Etat et de l’Episcopat en Pologne le Vatican a exigé du gouvernement d’interdire le parti Raison de la Gauche Polonaise alors crée car ce parti pronait la séparation de l’Eglise et de l’Etat. Ce parti RACJA n’a finalement pas été interdit mais il a été démentelé suite à l’infiltration de ses instances par des néolibéraux. Par la suite ces néolibéraux l’ont dissous en rejoignant dans la coalition de Janusz Palikot, un libéral anticlérical qui obtient en 2011 10% des voix au Parlement Polonais, puis ine fois le job de démentèlement fait, s’est évanoui dans la nature

La population d’Europe de l’Est est atomisée, les citoyens font face à une solitude effrayante et ne vivent aucunement leur vie selon un modèle occidental de liberté d’indivualiste. Dans ces circonstances, il est quasiment impossible de reconstruire des structures associatives, sociales et politiques sans aide et soutien d’amis exétieurs ayant de l’expérience et des ressources. Les organisations africaines me paraissent d’autant plus admirables et la démocratie africaine, notamment malienne, incarnée par des structures comme la CAD, le SADI et le Mouvement des Sans Voix sont  un exemple d’une grande vitalité. Un exemple dont nous devrions nous inspirer.

Lire aussi I – Les coopératives et les organisations politiques et sociales en Afrique de l’Ouest – un exemple pour nous organiser en Europe de l’Est?