Annuler la «dette publique» : le plaidoyer d’un ambassadeur grec

Par Leonidas Chrysanthopoulos
9 avril 2020

Le gouvernement grec a annoncé cette semaine des mesures pour soulager la détresse des personnes touchées financièrement à cause des restrictions adoptées pour protéger la population du Coronavirus. Ces mesures, qui s’élèvent à 6,8 milliards d’euros sur une période d’un à deux mois, sont appropriées et ont été bien accueillies par la population.

Mais quand cette somme sera dépensée, la pandémie étant supposée continuer… quelle sera la solution ? Le gouvernement a dores et déjà dénié avoir songé réduire les salaires et les retraites du secteur public. Mais par expérience nous savons tous que ces déclarations signifient qu’ils sont justement en train d’y penser.

Cependant, si le gouvernement osait de telles coupes budgétaires, les conséquences seraient les suivantes : les retraités, qui ont déjà vu leur revenu réduit de 60 % à cause des conditions imposées à la Grèce par les bailleurs de fonds européens et le FMI, ne seront plus capables de payer leurs impôts ni le remboursement de leur prêt aux banques, car le peu qu’il leur restera servira juste à les maintenir à flots ainsi que leur famille.

Et les salariés du secteur public feront de même. Les banques pourront toujours les menacer de confisquer leur bien, ça ne mènera nulle part car elles seront incapables de revendre les biens saisis, à présent que s’effondre le système économique dans son ensemble. Cette éventuelle réduction des salaires et des retraites pourrait aussi mener à l’effondrement de l’Etat, et les révoltes populaires conséquentes amener encore plus de fatalités que le coronavirus.

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Que pourrait donc faire le gouvernement ? Il pourrait déclarer aux prêteurs européens une cessation de paiements ou un moratoire sur la soi-disant dette publique de la Grèce. Pour cela rappelons tout d’abord quelles conditions ont été imposées au pays :

  • en 2020, la Grèce doit rembourser 5,9 milliards d’euros ;
  • en 2021, 4,9 milliards d’euros, en 2022 9,4 milliards d’euros ;
  • en 2023, 11,7 milliards d’euros ;
  • en 2024, 9,4 milliards d’euros ;
  • en 2025, 9,24 milliards d’euros ;
  • en 2026, 8 milliards d’euros ;
  • en 2027, 5,9 milliards d’euros ;
  • en 2028, 11,5 milliards d’euros, etc.

En raison des mesures exceptionnelles prises pour protéger la population de la pandémie, le gouvernement doit déclarer une cessation de paiements de la soi-disant dette publique, au moins pour les années 2020 et 2021. Cet argent sera nécessaire pour assurer la survie du peuple grec. Le gouvernement ne demandera pas aux prêteurs la permission de suspendre ses paiements, il les en informera par simple courtoisie. L’actuel chaos économique général et la dissolution anticipée de l’UE rendent difficile voire impossible une quelconque réaction des bailleurs de fonds à cette cessation de paiements que la Grèce déclarera.

Et nous ne devons attendre aucune décision de l’UE concernant l’émissions des « coronabonds » car elles ne seront pas à la hauteur et en plus en retard. Klaus Regling, chef du Mécanisme Européen de Stabilité (MES), a récemment déclaré qu’il aura besoin d’au moins un an avant que le moindre Eurobond puisse voir le jour…

Annuler la dette est donc la seule solution capable d’assurer la survie du peuple grec et du pays en cette période difficile qu’affronte l’humanité. La solution dite « facile » de réduire les salaires et les retraites ne mènera qu’à des troubles sociaux d’une ampleur telle qu’ils feront plus de victimes que le coronavirus, ce que nous ne souhaitons pas.