Le procès de l’assassinat de Thomas Sankara

Le 5 janvier 2021, nous avons publié un texte intitulé « Thomas Sankara : un révolutionnaire »*. Après avoir évoqué les faits marquant de sa vie, de ses combats, nous écrivions, en conclusion, que le procès de son assassinat pourrait avoir lieu cette année-là, courant 2021, soit 34 ans après la tuerie ayant provoqué sa mort et celle de ses 12 compagnons le 15 octobre 1987. C’est grâce à la campagne « Justice pour Thomas Sankara, Justice pour l’Afrique » menée par son épouse Mariam et ses amis, que le gouvernement burkinabé a nommé un juge d’instruction et débloqué la situation restée verrouillée pendant les 27 ans du régime dictatorial de Blaise Compaoré.

Malgré les nombreux obstacles pour éviter la tenue du procès – il fut plusieurs fois repoussé ou interrompu – il a pu s’ouvrir à Ouagadougou le 25 octobre 2021 et s’est achevé le 5 avril 2022 par la condamnation à la perpétuité des trois principaux inculpés : Blaise Compaoré, Hyacinthe Kafando, Gilbert Diendéré.

Reconstitution de la journée du 15 octobre 1987

Le procès a permis de reconstituer le fil des événements. Les accusés sont au nombre de 14: le médecin ayant signé un faux certificat de décès mentionnant « mort de mort naturelle », les organisateurs du complot, les membres du commando et les militaires présents sur les
lieux.

Elysée Ilboudo, l’un des 14 accusés, est un important témoin. Il raconte le déroulement des faits, révèle le mode opératoire, décrit le trajet du commando, étant le chauffeur de l’un des deux véhicules. Malgré quelques trous de mémoire, son récit est assez précis. Mais aux deux questions essentielles , à savoir le rôle de Hyacinthe Kafando, chef de la sécurité de l’ancien président Blaise Compaoré et la présence de Gilbert Diendéré, il ne répond pas, il ne se souvient plus, c’était il y a longtemps, dit-il….Mais d’autres témoins parlent. Le commando est donc bien parti du domicile de Blaise Compaoré, dans deux voitures. Il s’est posté sur les lieux, au Conseil de l’Entente, avant que Thomas Sankara n’arrive et s’installe pour une réunion. Alors qu’il sortait les mains en l’air, sous l’injonction du commando, il fut fauché le premier de plusieurs balles, sans sommation. Puis ce fut au tour des personnes qui étaient réunies avec lui. Gilbert Diendéré qui a tenté de nier sa présence sur les lieux, pourtant confirmée par de nombreux témoins, donnait les ordres. Il envoyait des militaires sécuriser la ville, accueillir des renforts venus de Pô, la garnison des commandos qu’il dirigeait, ou prendre le contrôle des casernes qui auraient pu réagir.

Ce procès est qualifié d’historique et exemplaire

Historique car c’est la première fois qu’un ex-Président africain, Blaise Compaoré, déchu, chassé par son peuple en 2014, est jugé dans son propre pays, par une juridiction militaire. Autre situation inédite : ce procès s’est poursuivi après le coup d’État du 24 janvier 2022. Alors que la justice militaire avait prononcé la reprise du procès, ce sont les avocats de la partie civile qui en ont demandé le report jusqu’au rétablissement de la Constitution, ce qui est intervenu au bout d’une semaine. Un cas d’école en ce qui concerne l’indépendance de la justice

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