Procès ou cérémonie sacrificielle ? -Julian Assange jugé le 23 janvier 2020

Par Monika Karbowska
Jan.28, 2020

Mon neuvième voyage pour une audience de Julian Assange à la Westminster Magistrate Court se déroule le 22 janvier comme toujours en Flixbus avec les migrants pauvres mais cette fois sous le signe d’émotions de plus en plus violentes : colère, exaspération et fatigue psychologique. Je suis une militante et mes émotions ouvrent la voie à ma réflexion sur l’opportunité éthique de mes actions. Les émotions sont le signe de notre humanité mais aussi la boussole qui permet de garder notre indignation citoyenne intacte et dirige subtilement notre intuition vers les solutions d’analyses ou d’action. Cette fois mes émotions me montrent qu’on atteint un point de non-retour, un basculement, un changement de cycle. En politique aussi les décideurs se font guider parfois par les systèmes de croyances superstitieuses, la cartomancie ou la numérologie, on a tous en mémoire François Mitterrand. Aujourd’hui, pour faire la lumière et gagner la bataille, pour libérer Julian Assange réellement, nous devons renverser le storytelling virtuel ce que Wikijustice fait, mais aussi comprendre ce que la réalité a de symbolique pour en arracher les signes du vrai pouvoir.

Je suis exaspérée parce que le déplacement de l’audience du 14 janvier au 13 à la dernière minute a exigé de nous de grands efforts physiques et organisationnels. Mais aussi il a chamboulé le programme établi le 19 décembre pour ce dernier « case management hearing » fixé au 23 janvier. Alors que nous espérions que Julian Assange comparaitrait physiquement pour participer pleinement à l’organisation de son procès, nous devons accepter qu’il est possible que soit vraies les rumeurs disant qu’il ne sera présent qu’en vidéo. Mais justement, je ne crois plus aux explications qui ne sont jamais officielles, rationnelles et justifiées. La justice par « vidéolink » est pour moi une aberration et une grave violation de la CEDH qui définit comme procès équitable un procès physique. Mais comme les textes des droits humains ne sont respectés dans le système capitaliste que si les citoyens s’en servent, ce ne sont hélas pas les migrants est-européens extradés en masse par la Westminster Court qui pourront faire valoir ces droits en l’absence totale d’organisations britanniques. Dans le cas de Julian Assange chaque audience marque un pas dans la recomposition du pouvoir dans cette affaire. Chaque élément nous apporte des indices sur le vrai pouvoir et c’est pour cela que je suis astreinte à noter tous les détails en restant ouverte à toutes les solutions. Y compris à la bonne nouvelle d’une libération immédiate de Julian Assange ce qui, rappelons-le, est juridiquement tout à fait possible avec un avocat qui ferait une demande de libération et un juge qui aurait envie de montrer qu’il ou elle est indépendant du pouvoir politique.

Alors j’imagine Julian Assange sortant simplement en homme libre par la porte du tribunal. J’imagine lui serrer les mains et tout lui raconter de ce qui s’est passé ici. J’imagine aussi tout ce qu’il faudra mettre en route pour s’occuper immédiatement de sa nouvelle situation de sans papier du Commonwealth libéré après 10 ans de détention réelle.

Pouvoir et hiérarchie dans une file d’attente

Dans cet état d’esprit entre colère et espoir je me lève à 5h pour arriver à 5h30 devant la porte du tribunal. Je sais maintenant que les « Greekemmies » arrivent encore plus tôt et que les places sont de plus en plus chères dans cette assistance. Effectivement, notre équipe est en place à 5h40, mais il y a déjà 3 personnes devant nous : une journaliste australienne, une dame d’un certain âge qui s’avère être une psychiatre ayant signé la liste « Doctors for Assange » et Paul, qui plus que jamais ce matin ressemble à une doublure de Julian Assange. Il est assis sur une chaise pliante, judicieuse idée après son malaise la semaine précédente. Toutes les personnes s’avèrent francophones et en conversant plus tard avec Paul j’apprends qu’il a passé son dernier été en France avec son vélo. Nous discutons donc, il faut garder la politesse malgré la tension et la fatigue, car nous sommes hélas en théorie alliés pour une cause mais en réalité en rupture du fait de nos différences de stratégie. C’est de cela dont m’entretient pendant plusieurs heures la docteure Felicity De Zulueta, me présentant sa collaboration d’il y a 20 ans avec l’avocate Gareth Peirce, et son propre travail en tant qu’experte auprès de réfugiés politiques, même si plus tard je ne trouve sur internet que la trace de sa vraie spécialité – le trauma des enfants victime de violences. Je lui dis qu’elle sera choquée, on ne sort pas indemne de confrontation de ce genre, même un non médecin comme moi voit les symptômes de torture que Julian Assange a subi. Dr De Zulueta acquiesce. Elle sait que la situation est mauvaise, elle a lu le rapport de notre médecin de Wikijustice. Elle apprécie la qualité de son travail. Je lui explique que Wikijustice a toujours voulu collaborer avec les proches de Julian Assange et avait proposé dès le mois de juillet 2019 aux avocats de discuter de la meilleurs coordination stratégique à mettre en œuvre pour un soutien optimal du prisonnier politique Julian Assange. C’est l’absence de réponse et les violences que nous font subir des personnages comme Greekemmy sous l’œil impassible des avocats qui nous a fait prendre une direction plus radicale. Sans oublier la lettre de SOS de nous avons reçue de Julian Assange le 17 août qui nous donne le DEVOIR et pas simplement le droit de tout mettre en œuvre pour le sauver.

Greekemmy  arrive en masse vers 6 heures mais quelques-uns de ses collaborateurs sont déjà derrière nous. Nous comptons les présents alors que notre amie J. en retard est douzième dans la file. Nous devrions rentrer tous, même si c’est salle 3. Hélas, la resquille sournoise est toujours reine : J. ne rentrera pas alors que d’autres dont Naomi Colvin, placée avant elle par Greekemmy pourront remplir leur compte twitter de remarques succinctes. Au fond, la police a beau installer des barrières de sécurité, c’est ridicule. Pour un homme des médias aussi célèbre qu’Assange a été il y a 10 ans, nous sommes à peine 30 devant ce lieu ou son sort final est scellée par le système inique qu’il a dénoncé. Mais pour lutter nous devons être là, nous n’avons pas d’autre choix. Julian Assange est privé de communication avec nous, privé de courrier, de colis, de mails, de l’argent que nous lui avons envoyé. Il ne reçoit plus de visites, pas même de John Shipton, disparu définitivement de la circulation. Une partie des 30 personnes qui attendent de 5h30 à 9 heures sont des journalistes qu’il connait et qui vont écrire sur lui des papiers stéréotypés. Ou ne rien écrire comme après le 19 décembre, audience sur laquelle aucun représentant de grand média n’a rien publié alors qu’ils s’exerçaient avec force à la chasse à la photo volée d’un homme épuisé enfermé dans un fourgon.

Il est enfin 9 heures et les agents de sécurité déverrouillent les portes. Nous entrons chacun surveillant sa place. J’ai de la chance, je passe très vite le détecteur de métaux, je vérifie sur les listes dans le hall, oui, hélas c’est salle 3, le nom Julian Assange est en tête de liste. Je me retrouve donc première devant la porte de la salle,  la docteure De Zulueta derrière moi, plus loin le psychiatre Derek Summerfield, avec autour d’eux les amis de notre équipe. La cheffe des huissiers Rosie Sylvester dirige les opérations et nous place, 25 personnes, en file indienne devant la salle de façon à dégager l’espace du couloir. Tant qu’elle est là, j’ai confiance, les règles sont respectées. Les problèmes peuvent commencer quand les agents de sécurité se retrouvent seuls sous le feu des diverses demandes et manipulations. D’ailleurs, aujourd’hui ceux qui gèrent la salle 3 sont de la même équipe Mitie qui faisait les gardes devant la porte de la salle 4 lors de l’audience fantôme du 20 décembre, émaillée de vices de procédures et potentiellement illégale. Le manager de sécurité Mitie qui a eu le droit étrange d’assister à une audience de huis clos le 20 décembre seconde l’huissière en chef mais je sais depuis le 18 novembre que quand elle n’est pas présente cet homme détient un pouvoir qu’il ne met pas toujours aux services des règles légales (présence incongrue lors du huis clos du 2° décembre ou comparaissait Julian Assange, coopération avec Greekemmy pour faire respecter ses listes illégale…). Les journalistes ont le privilège de s’assoir tranquillement sur les chaises de la salle d’attente. Ils sont plus de 20, presque les mêmes que le 13 janvier, sauf Moritz Muller du magazine allemand « Nachdenkseiten » que je reconnais de photo car il n’est pas venu avant. Justement, Greekemmy va voir chacun des journalistes un par un, elle leur parle et leur tend la photocopie d’un article de El Pais sur la procédure contre UC Global en Espagne. Avec le Dr Zulueleta nous échangeons sur la responsabilité indéniable de Rafael Correa et de son personnel diplomatique dont Fidel Narvaez dans la gestion de cette surveillance et de l’enfermement de Julian Assange dans l’appartement 3 rue Hans Crescent. C’est alors que je remarque Kristinn Hrafnsson assis avec les journalistes à côté du chef des «mementums » du projet DefendWikileaks John Rhees. A-t-il une carte de presse qu’il n’avait pas le 21 octobre, tout comme Joseph Farell ? Il est vrai que « Wikileaks » n’ayant pas de structure juridique et n’étant pas un médias le site internet n’a pas le droit de délivrer de carte de presse. Il est le projet « 04 Wikileaks » de la fondation Wau Holland mais cette organisation allemande est une association de formation et de défense d’usagers et pas un médias[i]. Kristinn Hrafnsson est bien actionnaire minoritaire de l’entreprise islandaises Sunshine Press Production crée en 2010 mais c’est une entreprise de production de film, pas un éditeur ou un journal[ii]. Peut-être que le CIJ, Centre d’Investigation du Journalisme, dont Joseph Farell et Andy Müller Maguhn sont les administrateurs, qui se charge de cette tâche bien qu’il soit inscrit au registre des associations de charité britanniques et pas des médias[iii]. Cette organisation est un centre de formation privé par ailleurs subventionnée par le célèbre oligarque américain Georges Soros et sa fondation Open Society Institute[iv].

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Etrange rituel collectif

Je réfléchis à la question quand les avocats des deux parties entrent dans le couloir et passent devant nous. Il n’y a pas de « froissement de robes» car dans les tribunaux magistrate les judiciaires s’habillent en civil mais la couleur noire des vêtements autant que l’aspect théâtral de leur comportement accentuent l’effet de « rite sacrificiel » qui me vient à l’esprit quand je me remémore tout ce que je vis dans ces lieux depuis 5 mois. Clair Dobbin arrive avec sa seconde, puis les « Américains », l’équipe d’accusation dans laquelle je reconnais l’homme âgé qui a refusé de me donner sa qualité et son nom à la fin de l’audience du 19 décembre 2019, s’enferment dans les salles marquées « privé » tout au bout du couloir. Ils saluent le groupe formé par Gareth Peirce, Edward Fitzgerald, Mark Summers et Alistar Lyon. Dans ce groupe je suis surprise de voir Stella Morris et aussi la femme blonde qui accompagnait  le 13 janvier le jeune garçon brun que Morris coachait le 19 et 20 décembre. Au fait, aujourd’hui, je connais le nom du garçon : MC Mac Grath[v]. Il est probablement américain, diplômé de l’université de Boston, du MIT. Il est hacker, informaticien et créateur du site Transparency Toolkit. Il vit à Berlin, collabore avec Russia Today Allemagne[vi], il a fait des conférences sur son site de surveillance du contre-espionnage. Selon moi, il ne peut au même moment être avocat britannique en stage. Il n’a donc rien à faire dans ce tribunal, ou alors moi aussi et mes amis nous devrions pouvoir nous assoir parmi les avocats dans la salle d’audience. Ces vices de procédures énormes qui devraient faire invalider ces audiences de mise à l’ombre de Julian Assange me font logiquement douter des diplômes et des qualités des autres avocats : si le secrétariat du tribunal enregistre n’importe quel informaticien comme avocat, comment croire qu’il a vérifié le diplôme de Stella Morris ou que Gareth Peirce a toujours le droit de plaider malgré le fait qu’elle soit à la retraite ?

La sensation de participer à un rituel sacrificiel, plutôt qu’à un procès politique crucial pour l’avenir de nos libertés sur le continent européen, s’installe alors et ne me quitte plus. Lorsque je vois Kristinn Hrafnsson et John Rhees agiter une petite carte de presse en plastique sous le nez d’un des agents de Mitie ma tension monte d’un cran. Je sais qu’ils doivent être accrédités et montrer leur feuille rose d’accréditation et je le rappelle à l’agent. Me voyant, le manager de Mitie prend les choses en main : il appelle les porteurs de la feuille d’accréditation, fait entrer ces journalistes dans la salle. Après il fait entrer le public. Je m’installe au premier rang pour bien voir l’écran des deux côtés entourée de mes amis, les deux psychiatres et Paul à ma droite. Paul a perdu son aspect pataud, Greekemmy ne le gère plus et il joue un rôle que je comprends comme important. Alors que le deuxième rang prend place, je vois que ceux qui n’ont pas d’accréditation sont quand même acceptés par la sécurité privée. Ils auront même le droit d’utiliser leur téléphone pour taper leur texte alors que les nôtres sont sévèrement vérifiés pour rester éteints. Lorsque nous remarquons l’inégalité de traitement à l’agente de Mitie qui nous scrute, elle nous fait valoir que eux écrivent avec leur machine. Face à ces personnes entrées sans accréditation, utilisant des téléphones interdits, j’ai l’impression encore plus nette que le tribunal est une salle privatisée par des intérêts privées dans laquelle se déroule une cérémonie n’ayant rien à voir avec la justice officielle de l’Etat.

La sensation devient quasi-certitude lorsque je vois la journaliste australienne arrivée tôt le matin demander leur nom un à un aux « Américains », un jeune homme, deux jeunes femmes, l’homme âgé brun au sourire satisfait et la collaboratrice habituelle de Clair Dobbin. L’Australienne demande et obtient immédiatement ce que nous et nos alliés n’avons jamais pu arracher depuis que nous hantons ces salles. Etrange procès politique ou tout le monde des avocats, des juges et des journalistes checkés par le monde de Greekemmy se connait et travaille ensemble comme dans le proverbe polonais « Reka reke myje », « la main lave la main ». La secrétaire du greffe portant voile parait très effacée, même si elle effectue le job d’appeler « Julian Assange » à l’écran vidéo, télécommande en main. De même la greffière derrière son lointain bureau parait absente et préoccupée par la gestion de la suite, des 20 Polonais, Roumains et Slovaques dont elle doit gérer l’extradition après la fin de l’encombrante réunion sur Assange. Il est 10 heures moins cinq sur l’horloge de la salle. Je suis là pour voir Julian Assange et éventuellement lui transmettre nos messages par la pensée, le cœur et le regard. Julian Assange semble seul face à la cérémonie qui dispose de sa vie.

Procès ou interrogatoire en vidéo?

A l’écran je vois d’abord une rangée de trois fauteuils rouges dans une petite pièce aux murs bleus ou violets. La lumière est crue et déforme la perception des couleurs. Au loin sur le mur un panneau « HMP » mais on n’y voit pas inscrit le mot « Belmarsh ». La scène est filmée différemment que d’habitude. La caméra est placée à trois mètres des fauteuils. « Pour qu’on ne voit rien », me dis-je. Effectivement, d’abord un gardien en uniforme vaguement marron entre dans la pièce. Nous n’avons jamais pu voir les uniformes des gardiens de Belmarsh, ceux qui travaillent à l’entrée du site sont vêtus de chemises blanches et de pantalons noirs. La volonté de nous montrer que la prison est réelle parait manifeste aujourd’hui. Ensuite derrière la petite fenêtre de box je vois passer la silhouette longiligne de Julian Assange, plus haut que son gardien, marchant d’un pas mal assuré. Il entre dans la pièce et se laisse choir sur le fauteuil central. Ma colère monte. Ils le montrent de tellement loin qu’on ne voit absolument pas son visage. Il s’agit qu’on ne distingue pas les expressions de son visage, ses mimiques, pour qu’on ne puisse pas déceler les traces de sa souffrance. Les signes de la torture. Je ne peux même pas dire quelle est la longueur de sa barbe et de ses cheveux, ni que disent ses yeux. En fait, cela peut ne pas être lui. Comment pourrions-nous le constater alors que nous le distinguons à peine sous une lumière blafarde comme s’il se trouvait à 100 mètres de nous ? Julian Assange porte un costume marron et je vois des baskets foncées à ses pieds ainsi que des chaussettes claires. Il est tout de suite immobile, met les mains sur les cuisses, puis les croise devant lui, met le pied droit sur le genou gauche et ne bouge plus de longues minutes. En entrant il portait un dossier, mais dès qu’il est assis, il pose l’artefact inutile sur le siège voisin et ne le touche plus, la pile de papiers parait de loin comme un magazine illustré posé dans une salle d’attente.

Mais c’est alors que je remarque que quelqu’un est assis en face de lui hors champ. Je distingue une main, une forme humaine qui bouge. Julian Assange est observé lors de son procès par un gardien invisible comme dans une salle d’interrogatoire. Je suis sidérée par cette scène qui est si contraire aux droits de l’homme, aux traditions de l’habeas corpus, à toute cette longue histoire de luttes pour les droits attachés à la personne ici même en Angleterre dès le Moyens âge. Cette histoire de lutte que j’ai apprise avec passion dès 1988 lors du début de mes études à l’Institut d’Histoire de l’Université de Varsovie. Comment se fait il qu’on vive une régression pareille, alors que depuis l’antiquité les gens luttent contre l’arbitraire royal  et que le droit à la justice, c’est se confronter en liberté au jugement des hommes et de celui de Dieu, face à face, assumer ses fautes tout comme prouver son innocence ? Quelle valeur a la parole d’un homme enfermé dans une cage qu’on va présenter au juge alors que son bourreau ou le policier le regarde fixement ? Comment peut-on encore parler de procès ? Je propose le nom de de sacrifice rituel, cela parait plus approprié. Même l’Inquisition, qui s’y connait en torture, prenait soin de garder l’apparence d’un vrai procès dans lequel l’accusé s’exprimait librement alors qu’il avouait ses fautes et qu’il est condamné à mort. Sans procès, la condamnation à mort n’a pas de sens, et donc l’existence de l’Inquisition est inutile. Autant tuer l’accusé tout de suite d’une balle dans la tête ou d’un missile sur drone. Pour que l’assassinat devienne justice, il faut certaine règles. Si ce procès ne respecte pas ces règles, il n’est qu’un rituel d’abattage. Je pense aux amis communistes polonais, à Mateusz Piskorski poursuivi et accusé d’espionnage pour avoir osé critiquer la domination américaine en Europe. Je pense à moi-même et tout mes amis de lutte. Si Julian Assange sera mis à mort dans ce rituel sans qu’il y ait une chance de vrai procès, alors nous serons très vite les prochains sur la liste.

Pendant que « l’interrogateur »trahit sa présence en bougeant ses mains au premier plan, Julian Assange, qui ne voit pas la salle, s’agite, ne tient plus en place sur la chaise. Il frotte ses mains, touche ses cheveux, regarde à droite et à gauche comme s’il voulait sortir son regard du champ de vision de l’interrogateur, puis s’immobilise. On dirait qu’il dort, il fuit l’intolérable en se retirant à l’intérieur de lui. Pendant ce temps Hrafnsson écrit sur son téléphone puis regarde fixement Fitzgerald prendre place au premier rang entre Gareth Peirce et Mark Summers qui restera silencieux. Sur le même banc tout près d’eux, Clair Dobbin est assise droite comme un I. Derrière, le rang de l’accusation américaine. Au dernier plan, Alistar Lyon côtoie Stella Morris, l’autre femme et MC Mac Grath qui ne prend aucune note et ne regarde pas Assange. Vanessa Baraitser entre et commence la cérémonie formelle.

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Rituel pré programmé ou procès ?

A l’ordre de « s’identifier formellement, vous m’entendez » , Julian Assange répond d’une voix lasse mais moins hachée que précédemment « Yes, I am Julian Assange, 3 July 1971 ». Et c’est tout ce qu’il dira aujourd’hui alors que sa vie se décide dans une mécanique implacable de l’écrasement final. Il n’a pas la force de faire plus. Nous le savons depuis le rapport de notre médecin sur la torture. Ce procès ne devrait jamais avoir lieu et les avocats devraient boycotter ce théâtre mortifère et crier au scandale partout et jusqu’au dénouement. Ils et elles ne le feront pas parce que cela les arrange de mener les choses comme ils les mènent.

L’accusation commence les hostilités et pendant dix minutes Clair Dobbin dialogue avec la juge d’une voix ferme. Son débit est rapide et toute mon attention est tendue pour la comprendre et prendre des notes. Dobbin rappelle que la cour a décidé le 19 décembre de donner à l’accusation jusqu’au 10 janvier pour présenter leurs « preuves » et de tenir le « full extradition hearing » en février et mars sur 4 semaines. Elle estime que l’accusation a répondu à ces exigences. J’entends la représentante britannique de l’accusation états-unienne citer plusieurs fois « the United States », souligner que « the USA » ont répondu, puis je suis inquiète lorsque je comprends qu’elle répète que des experts médicaux américains devraient examiner Julian Assange. Pas question pour nous de laisser passer cela. Julian Assange est déjà vu par ces gens comme un gibier pris au piège, cela fait 5 mois que je les observe. On voit à l’œil nu que son état se dégrade dans les prisons anglaises, mais ce n’est pas à ses pires ennemis de décider si oui ou non il a été torturé – c’est à l’administration britannique de prendre ses responsabilités et à l’ONU de veiller à ce qu’il soit soigné dans un pays vraiment neutre et éloigné de l’influence de Washington. En Occident, ces pays ne sont pas légion, la France est un de ces rare pays à ne pas avoir de base américaine sur son sol et nous disposons du tissu associatif et médical pour veiller à la neutralité de cette expertise.

Pour l’heure Julian Assange demeure impassible, étrangement immobile alors qu’on parle de sa vie. Je suis certaine qu’il n’entend rien. Si on pouvait prouver cela, la procédure devrait être annulée pour vice de forme. D’ailleurs, je m’interroge sur une autre étrangeté : Clair Dobbin parle des « Etats Unis » mais seul une instance juridique a le droit de faire une requête en extradition auprès du gouvernement britannique sur la base du « Extradition act » de 2003. Cette instance n’est jamais citée et pis, l’acte d’accusation n’a jamais été lu formellement. Le sera-t-il enfin le 24 février au moment de la procédure finale ? Un procès sans acte d’accusation me semble vraiment étrange. Si on ajoute les vices de procédures qui sont légion, l’impression d’assister à quelque chose de faussé se renforce. D’ailleurs, le Grand Jury qui aurait décidé en secret de poursuivre Julian Assange pour espionnage est une structure plutôt politique que judiciaire purement états-unienne et qui n’a pas d’équivalent dans aucun autre pays. Le traité d’extradition bilatérale reconnait-il cette institution comme instance juridique dont les décisions devraient obligatoirement être appliquées par les tribunaux britanniques ? Je ne le crois pas. En diplomatie rien n’est automatique, tout est régit par la règle de la réciprocité. Si le Grand Jury n’a pas d’équivalent en Grande Bretagne, il appartient au procureur britannique de formuler cet acte d’accusation à l’encontre de quelqu’un qui n’est ni citoyen états-unien, ni britannique et qui n’est pas protégé par le droit consulaire de son propre pays. Si Julian Assange était Polonais, Tunisien ou Grec, le consul de son pays aurait bien été obligé de lui rendre visite en prison et d’être présent dans cette salle avec nous. Il n’y a pas de consul australien en Grande Bretagne et cette situation jette une lumière crue sur le statut colonial de l’Australie vis-à-vis de la Grande Bretagne.

Justement Clair Dobbin et Vanessa Baraitser se lancent dans un long dialogue sur le calendrier de l’extradition. Je les entends parler du procureur Lewis occupé à des affaires en Irlande du Nord et non disponible en février. Pour nous, défenseurs de Julian Assange, les occupations du procureur nous sont bien égales, je me demande même pourquoi une Cour y consacre autant de temps comme si on se trouvait dans un secrétariat et qu’on discutait planning entre assistantes de direction. Je comprends néanmoins que Dobbin propose de diviser les programmes de la « mise à mort » en deux et derechef Baraitser acquiesce comme si c’était plié d’avance. Cap sur le 18 mai ou tout se jouera après une semaine de mise en bouche du 24 au 29 février. Je suis très inquiète, je scrute la réaction des avocats de Julian Assange mais un homme s’approche de la secrétaire du greffe et cache les protagonistes Je peux juste constater que Julian Assange est comme endormi sur le siège du box, son corps penche légèrement vers le côté droit. La semaine dernière sa jambe droite avait lâché alors qu’il marchait. Et s’il avait été victime d’un léger AVC ? Cela expliquerait aussi ses difficultés d’élocution. Hrafnsson et Rhees regardent fixement Fitzgerald, mais ne réagissent par aucun geste à cette surprenante modification des événements. Sont-ils déjà au courant ?

Edward Fitzgerald a enfin la parole, il se lève et au lieu de commencer une forte diatribe en défense de son client, il affirme qu’il soutient l’accusation dans la proposition d’effectuer de « diviser les audiences » ! Il parait même tout à fait en harmonie avec Clair Dobbin, il la regarde en tout connivence, elle est debout elle aussi, et ils se regardent à un mètre de distance en toute entente. Pourquoi pas. Après tout dans la vraie vie ils sont collègues, avocats dans le même milieu, travaillent ensemble sur certains dossiers, en concurrence sur d’autres. Il serait naturel qu’ils se fréquentent en privé, mangent ensemble ou plus. Voila pourquoi d’habitude dans les procès politiques les victimes luttent pour que les affaires soient dépaysées dans des tribunaux d’autres villes pour éviter les collusions d’intérêts liées à la proximité inévitable de la vie locale. Edward Fitzgerald fait tout de même un minimum son job en demandant « more time for evidence », plus de temps pour présenter les preuves. Les preuves, ce sont les témoins qui doivent comparaitre. Il parle d’un nombre « significatif » de témoins, il cite des témoins désignés par des numéros, témoins 4, 6, 12, sans leur nom ni leur initiales. Le douzième témoin est clé car lié à la « spanish procedure ». Baraitser parait s’intéresser aussi à ce procès en Espagne et accepter l’importance de tous les témoins issus de cette procédure. Pourquoi ? La seule fuite des vidéos de surveillance ne peut mécaniquement entraver la procédure d’extradition. D’ailleurs ne nous savons toujours pas qui est le plaignant et si Julian Assange y est témoin ou victime et qui a été désigné, et surtout par qui, en tant que suspect.

D’un point de vue oratoire M. Fitzgerald n’est pas très bon : il bafouille, bégaye parfois, a du mal à finir ses phrases. Parfois son intervention prend des accents surréalistes quand il dit attendre les « instructions » de Julian Assange alors que Julian Assange ne le regarde pas et peine à rester droit sur son siège. Je me demande comment il pourrait être en état de donner des instructions s’il n’est pas en état de santé suffisant pour assister à son procès. Je m’irrite quand M. Fitzgerald élude la question de la santé de Julian Assange par un « we are not in the position to face the medical background of Julian Assange ». Cette attitude me révolte alors qu’il a entre les mains la vie de Julian Assange pour lequel il peut exiger un rapport médical indépendant et une libération pour raison de santé détruit

Au contraire, Edward Fitzgerald, sous l’œil attentif de Gareth Peirce, rentre dans le calendrier de l’extradition, discute avec la juge des dates limite de dépôt des preuves, affirme que certains témoins sont « not available » et que les « spanish witness » , témoins espagnols, sont les plus importants. La juge commente les détails, demande la disponibilité des témoins numéros 10, 11 et 12. L’avocat dit qu’il y a un volume important de documents à lire et qu’il faudrait une semaine de plus en mars. On est de nouveau dans l’ambiance « secrétariat de direction » alors que Julian Assange s’affaisse de plus en plus sur sa chaise. Fitzgerald promet de soumettre la liste des témoins au 1 février et de s’assurer, il en a l’espoir, qu’ils vont tous venir témoigner. Dans un bégaiement il souligne qu’il lui faut du temps pour « prendre les instructions auprès de M. Assange », expliquer les publications et donner du temps au témoins pour consulter leur disponibilité. Il demande trois ou quatre semaines de procès et une journée par personne pour permettre à chaque témoin de résumer sa position. D’un point de vue formel il est toujours agaçant d’entendre des expressions négatives dans le discours d’avocats qui devraient être rompus aux joutes politiques. A présent j’ai du mal à supporter d’entendre parler de « extreme complexity », ou de « great difficulties » ou encore « not easy process ». Mais Kristinn Hrafnsson parait satisfait de la tournure des événements. Julian Assange semble par contre de moins en moins concerné, il regarde vers le bas, ne voit donc pas la Cour, ne réagit à rien, et surtout il ne touche pas au dossier qui est censé représenter sa défense et qui git sur le siège à côté. Je distingue à force d’efforts l’extrême tristesse qui se lit sur son visage.

M. Fitzgerald pourtant assure vouloir « impliquer Mr Assange à chaque stade de la procédure » quel que soit son « medical background ». (J’ai du mal à comprendre cette dernière expression. Soit l’accusé est capable de participer à son procès, soit non. Si non, le procès doit être ajourné et la personne soignée, je ne vois pas de troisième voie juridiquement parlant.). Lorsque Fitzgerald commence à dire que les « USA doivent répondre aux témoins » et évoque enfin l’examen de la validité de la procédure d’extradition selon le traité de 2003, Clair Dobbin reprend la parole et le contre facilement en exigeant de raccourcir les délais. Alors Vanessa Baraitser résume ce sur quoi ils sont d’accord (les dates de février et celles de mai) et liste les non accords. Et elle ordonne une suspension de séance.

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« Messieurs et Mesdames les avocats, s’il vous plait…. »

Nous gardons les yeux rivés sur Julian Assange qui est presque étendu sur le siège du box. Mais les agents de sécurité nous virent de la salle assez brusquement. Il est 11h, ils annoncent que l’audience doit reprendre à 11h15 puis à 11h30. C’est dur. Nous devons ramasser nos sacs et sortir pour de nouveau rester plantés devant la porte à affronter Greekemmy qui ne perd pas une occasion pour nous pousser dehors. Naomi Colvin est même tellement sûre de son statut qu’elle tentera de rentrer avec les avocats avant d’être empêchée in extremis par un agent. Je crois que ce cinéma est fait pour qu’on n’assiste pas à la négociation et à l’entente entre avocats, accusation et juge. C’est aussi simple que cela.

Je suis très fatiguée et excédée lorsque nous avons le droit de revenir dans la salle. Les agents de sécurité se font plus rudes et nous obligent à nous asseoir au fond du box alors que de là nous ne voyons plus Julian sur l’écran de droite. Dobbin attaque immédiatement posant les dates du 14, du 20 février et du 27 mars avec 3 semaines de procédure d’accusation et de réponse de la défense. Fitzgerald est d’accord. Il répète l’importance des « spanish issues ». Comme les avocats ne nous informent de rien, il va falloir faire notre enquête nous-même en Espagne. La juge acquiesce. Pendant ce temps le pauvre Julian Assange reste apathique, les main affalées sur les genoux, il a un rictus de souffrance sur le visage – à force d’efforts de concentration, je finis par mieux distinguer ses traits. Joseph Farell, assis parmi les journalistes, sort de sa poche une petite lunette et scrute son ancien chef de projet froidement. Vanessa Baraitser est satisfaite. Elle se tourne vers l’écran et à haute voix nous informe du programme : 19 février, dernier « case management hearing», avec vidéolink qui servira aussi à prolonger la détention, puis le « full extradition hearing » à Woolwich dans la semaine du 24 février, éventuellement jusqu’au 2 mars, puis trois semaines à partir du 18 mai. Mais elle a oublié de s’assurer que l’accusé a bien compris ce qui lui arrive et elle sort. L’audience est finie. Je ne tiens pas et je me charge de rappeler au moins aux avocats ce vice de procédure qui aurait dû leur permettre de faire annuler toute l’audience. Je lance en Français vers la salle « Messieurs, Mesdames pouvez vous demander à Julian Assange s’il a bien compris ce qui va lui arriver » ? Un bruit étouffé réagit à mon intervention que j’ai clamé d’une voix forte, ras le bol d’assister passivement à la mise à mort de l’agneau sacrificiel. Il y des limites à tout. Des militants et le psychiatre me demande de répéter en Anglais. Mais Rosie Sylvester me saisit le bras et me menace d’être interdite d’entrée dans la cour. Je m’excuse auprès d’elle, car elle fait tant d’effort pour que cet étrange endroit respecte quelques règles élémentaires.

Mais je crois que c’est trop d’émotions pour moi. Nous sortons et retrouvons les amis qui n’ont pas pu entrer. Certains réussissent à parler à M. Fitzgerald et Madame Peirce. Fitzgerald leur assure que Julian va très bien et qu’il le voit tous les jours quand il veut. C’est totalement contradictoire avec ce que Gareth Peirce a répété sur tous les tons depuis octobre devant nous, qu’il est quasiment impossible pour elle d’effectuer les « legal visit » à Julian Assange. Quand à sa santé, tout le monde le voit maintenant. La docteure De Zulueta a été très émue par la souffrance visible de Julian Assange et nous a exprimé son émotion lors de la pause forcée. Alors, lequel des avocats ment dans cette affaire ?

L’argent

Gareth Peirce a assuré à notre ami J. travailler gratuitement, « pro bono ». Or, dès l’audience finie, Joseph Farell appelle devant les caméras à donner de l’argent sur le site de la fondation Courage, argent destiné à assurer la défense de Julian Assange. Courage est un projet de la Fondation Wau Holland et c’est à cette structure allemande que les citoyens sont invités à verser de l’argent pour payer les avocats de Julian Assange via le site https://wauland.de/en/projects/moral-courage/. Cependant, pour les dons non défiscalisés, il est conseillé par les gérants du projet Courage d’envoyer son argent par transfert à une banque de New York, l’adresse du récipiendaires étant Courage Foundation, 201 Varick St., P.O. Box #766, New York, NY 10014, USA[vii]. Pour nous, il pose problème que des personnes de bonne volonté soient appelées à envoyer leur argent aux Etats Unis dans un pays qui poursuit Julian Assange juridiquement et de fait le persécute. Comment se fait-il que les collaborateurs du projet Wikileaks qui sont les fondateurs de la fondation Courage, Sarah Harrison par exemple, n’aient pas vu la contradiction et le danger qui nous saute aux yeux immédiatement ? Installer le siège de la fondation Courage censée défendre Julian Assange aux Etats Unis, pays le plus hostile à Julian Assange, c’est de fait mettre en danger les citoyens soutenant Julian Assange et tous les opposants aux politiques guerrières états uniennes et car cela permettra à l’Etat américain de ficher les coordonnées de ces opposants, notamment européens, par le biais du contrôle de leur dons financiers.

Cela nous alerte d’autant plus que le 201 Varick Street est un immeuble appartenant entièrement à l’Etat fédéral américain[viii]. S’y trouve le Bureau des Mesures Technologiques dépendant du Homeland Security Department – c’est-à-dire du ministère de l’intérieur américain et la Cour du Bureau de l’Immigration dépendant du ministère de la justice. Ce tribunal fédéral américain valide aussi les expulsions et gère toutes les lois touchant le séjour des étrangers aux Etats Unis, comme Julian Assange est en instance d’extradition vers les USA, l’impression est forte que la fondation Courage est installée dans la proverbiale gueule du loup. Je me rappelle aussi du concert étrange organisé par la fondation Courage le 5 novembre 2019 devant le Home Office, le ministère de l’Intérieur britannique. Que la fondation Courage,pilotée par la Wau Holland Stiftung allemande, loue des bureaux dans ce genre d’endroit et de plus organise des concert devant la « gueule du loup » britannique est pour le moins surprenant et inquiétant.

D’ailleurs, pour les autres lanceurs d’alerte comme Jéremy Hammond, le site https://freejeremy.net/donate sur lequel on rentre par le lien « Donate » du site de la fondation Courage renvoie le donateur à la société Derek Rothera & Company, Chartered Accountants, Units 15 & 16, 7 Wenlock Road, à Londres[ix]. Problème, ce gestionnaire de comptes nous a assuré ne plus s’occuper de la fondation Courage depuis 2016. Selon Derek Rothera Compagny, la fondation a rapatrié ses comptes à New York et les gère de là-bas. Il me semble que pour la confiance des donateurs un audit public de la fondation Courage est nécessaire et la publication légale de ses bilans financiers indispensable.

Je ne suis pas hostile à ce qu’un bon avocat soit rétribué notamment pour avoir l’assurance qu’il ou elle est en capacité de se consacrer pleinement à sa tâche. Je suis tout à fait d’accord à ce que des dons soient versées par les citoyens à Julian Assange pour l’aider à rétribuer un avocat efficace. Mais Julian Assange n’est pas président ni même administrateur de la fondation Courage et emprisonné, il n’est pas en capacité de décider de quoi que ce soit en la matière. Les personnes qui gèrent la fondation Courage et récupèrent les dons des citoyens doivent accepter un contrôle citoyen sur l’utilisation de ces dons. Ceci est d’autant plus urgent qu’en Europe, les lois sont claires : ne peuvent être récoltés auprès des citoyens européens que des dons versés à une organisation ayant un siège officiel dans un pays européen et dument enregistrée selon les lois de ce pays. Le lieu d’enregistrement de ce type d’organisation peut varier (Préfecture pour la France, tribunal pour la Pologne, registre des organisations de charité pour la Grande Bretagne) mais partout les obligations légales sont les mêmes : publication des bilans d’activité et des bilans financiers chaque année afin que le montants des dons et leur utilisation soit publics. Il n’est pas normal que la fondation Courage récoltant des dons pour la défense de Julian Assange échappe aux obligations des lois européennes de transparence et de ce fait, au contrôle citoyen. Nous appelons les  dirigeants légaux de la fondation Courage à prendre leurs responsabilités à rapatrier le siège de la fondation en Europe et à publier les bilans financiers de l’institution. Il y va de la crédibilité de leur action.